Formation « Valeurs de la République et laïcité »

10e session : des formatrices témoignent

Portraits de Aurore Rançon Meyrel et Karine Texier
© Nesma Kharbache/ANCT

L’ANCT et le CNFPT ont animé, du 9 au 12 mai dernier, la 10e session de formation de formateurs de formateurs sur les « Valeurs de la République et la laïcité », lancée en 2015. Témoignages de deux participantes, l’une exerce à la PJJ Touraine-Berry, l’autre à la ville de Chennevrières-sur-Marne (94). Toutes deux iront ensuite former des personnes qui formeront, à leur tour, des professionnels de terrain.

  • 70 000

    bénéficiaires de la formation depuis 2015

  • 60

    participants à la 10e session "formateurs de formateurs"

Portrait extérieur devant un bâtiment en verre ; lunette, cheveux courts et chemisier bleu
N. Kharbache/communication ANCT

Impliquée depuis 2015 dans le déploiement de la formation « Valeurs de la République et laïcité », Karine Texier est formatrice. Au sein de la Protection Judiciaire de la Jeunesse (PJJ) du territoire de la Touraine-Berry, elle est « référente laïcité et citoyenneté ».

Karine Texier appartient au réseau des référents laïcité et citoyennetés de la PJJ, constitué au lendemain des attentats contre le journal Charlie Hebdo. Un réseau de 74 référents, répartis sur l’ensemble du territoire, et animé par la Mission nationale de veille et d’information.

Quels sont les besoins de vos collègues ?

Aujourd’hui, les sujets autour de la laïcité et de la religion restent sensibles et porteurs de nombreux débats, préjugés, questionnements, voire de contresens.

Pour impulser une dynamique de mutualisation des outils et des méthodes sur ces champs spécifiques, j’anime un groupe « ressource laïcité citoyenneté » depuis 2019, avec des éducateurs de chacune des sept unités éducatives du territoire de la PJJ Touraine-Berry (qui couvre le Cher, l’Indre et Loire, le Loir et Cher et l’Indre).

Dans ce contexte, plusieurs réflexions ont émergé de la part des professionnels de terrain. Comment répondre aux situations et difficultés rencontrées dans l’exercice éducatif avec les jeunes sous main de justice ? Comment mieux s’outiller pour mettre en pratique, au quotidien, le principe de la laïcité ?

La mise en place d’une formation Valeurs de la République et laïcité m’est apparue comme étant un levier pertinent pour accompagner les éducateurs sur ces questions. Par les approches qui sont à la fois historiques, juridiques et pratiques des principes de laïcité, elle permet d’acquérir un socle commun de connaissance.

Sur le terrain, auprès des jeunes, comment la PJJ intervient-elle sur cette problématique ?

Le besoin, c’est aussi de travailler à la promotion des valeurs de la République avec les jeunes suivis et de former les agents, titulaires ou contractuels, sur cette thématique.

Ma mission consiste donc à accompagner et à soutenir les équipes éducatives dans la mise en place d’actions de prévention autour de la laïcité, en France. Ces actions permettent aux jeunes d’appréhender et de mieux comprendre le principe de laïcité et ainsi lutter contre les préjugés et les idées reçues sur ces sujets, par le biais de supports multiples et variés : une exposition Ado et Citoyen, Ma France parlons-en, un escape game « Traqueurs d’infox  », un jeu I Laïc… L’approche ludique et interactive, c’est souvent ce qui fonctionne le mieux auprès de ces jeunes !

Des « stages citoyenneté » permettent également d’aborder ces sujets en collectif sous des angles variés (débats, rencontres, déploiement du support numérique « Ma France Parlons-en ! ») L’approche par le jeu vise à favoriser l’appropriation du principe de laïcité par les équipes éducatives et à les accompagner pour appliquer celui-ci dans l’exercice de leurs missions auprès des jeunes.

Une fois que vous avez formé vos collègues à cette approche, quel est l’impact dans l’exercice de leur métier ?

Les participants ont souligné très positivement les contenus de la formation et, en particulier, ceux basés sur le droit qu’ils peuvent réinvestir dans leur pratique. Les modalités d’animation pédagogique employées (jeu de rôle, quiz, travail sur des cas pratiques…) ont été très appréciées de par le débat et l’échange qu’elles ont suscités.

De manière unanime, cette formation a répondu aux besoins et demandes des agents. Elle leur apporta un appui et un soutien dans le cadre de leurs activités quotidiennes et leur permet d’être mieux outillés pour faire vivre la laïcité.

À savoir

La Mission nationale de veille et d’information (MNVI) a été créée en avril 2015, dans les semaines qui ont suivi les attentats de janvier 2015 et en déclinaison du plan gouvernemental de lutte contre la radicalisation violente et les filières terroristes d’avril 2014.
Cette mission se compose d’un réseau de 74 référents, nommés « référents laïcité et citoyenneté », présents sur l’ensemble du territoire. La MNVI a un rôle de coordination et d’information en matière de prévention et de lutte contre la radicalisation violente en vue de soutenir et d’enrichir les pratiques des professionnels.

Portrait en extérieur, sur un banc enturé de haies ; femme brune, cheveux mi-longs en tailleur bleu foncé
N. Kharbache/communication ANCT

 

Aurore Rançon Meyrel est directrice des Affaires juridiques et de la Commande publique de la ville de Chennevrières-sur-Marne, commune de 18 000 habitants du Val-de-Marne. Elle a participé à la toute première session de formateurs de formateurs, organisée par l’ANCT et le CNFPT, en décembre 2015.

À votre sens, à quels besoins répond cette formation sur les valeurs de la République et la laïcité ?

L’enjeu est d’avoir une vision globale de l’état de la laïcité, en France, d’en connaître les différentes approches : philosophique, politique et juridique. Les ateliers nous permettent de prendre en main le kit pédagogique de la formation. À travers des cas pratiques (dans un club sportif, à la cantine…), nous mettons en lien des situations vécues avec le droit.

Au final, elle aidera les professionnels que nous formerons à avoir une posture adaptée par rapport à des situations qui, aujourd’hui, peuvent s’apparenter à des questions liées à la laïcité mais n’en sont pas. Elle donne des clés pour repositionner la laïcité pour ce qu’elle est, tout ce qu’elle est, mais aussi seulement ce qu’elle est…

Dans les collectivités territoriales, quels besoins des agents observez-vous ?

Étant arrivée en janvier dernier à Chennevrières-sur-Marne, je n’ai pas encore pu faire un état des lieux précis sur la question de la laïcité. Mais, c’est bien une question que la direction des services se pose, et elle réfléchit à qui désigner en tant que référent laïcité.

Au vu de mes précédentes expériences dans d’autres collectivités cependant, j’ai constaté qu’il y a de vraies interrogations sur ce sujet. Tout le monde a l’impression de savoir ce qu’il en est de la laïcité, mais chacun a une réponse par rapport à ses propres opinions… Peu de personnes connaissent le vrai cadre juridique.

Par exemple, pendant les confinements sanitaires, beaucoup de voix se sont insurgées contre la fermeture des lieux culturels et le maintien des lieux de culte. Or, l’État a une obligation d’assurer le libre exercice du culte ! Il s’agissait d’un enjeu légal, ce qui ne s’applique pas aux cinémas, théâtres, etc., même si la culture représente un enjeu sociétal.

Cette formation éclaire aussi des aspects de notre vie quotidienne ?

Oui, elle apport des clés de lecture qui permettent de relativiser les enjeux religieux, de replacer ces questions à leur juste valeur et de faire un pas de côté.

Ça fait six ans que je connais cette formation ; j’ai participé à la toute première session de formateurs de formateurs, quelques mois après les attentats de 2015. Je me rends compte, en fait, qu’elle aide au vivre ensemble et permet d’apaiser le dialogue dans bien des situations.

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