INTERVIEW

« La ruralité n’est pas un bloc homogène : l’État doit s’adapter à ses spécificités »

Portrait Joël GIRAUD

Pour l’ANCT, Joël Giraud, secrétaire d’État chargé de la Ruralité, évoque les enjeux et leviers de la relance des territoires ruraux et ses ambitions pour l’Agenda rural. Il appelle services de l’État et autorités locales à coordonner leurs actions sur le « dernier kilomètre ». Une approche où, souligne-t-il, l’ANCT joue un rôle de « fabrique à projets », central pour la ruralité.

Quels seront les principaux leviers de la relance pour les territoires ruraux ?

La crise sanitaire a provoqué un déclic favorable à la ruralité. Beaucoup de Français ont découvert, à cette occasion, le télétravail ou les consultations en télémédecine. Ils se sont aperçus que l’on pouvait faire beaucoup de choses en dehors des villes et profiter pleinement des aménités rurales que sont l’espace, les paysages ou le rapport à la nature.

Mais, ce déclic ne se traduira par une réelle dynamique que si nous parvenons à réduire la fracture numérique, à améliorer les mobilités et à assurer l’accès aux services publics du quotidien. Il nous faut, en particulier, développer, avec les autorités locales, une vraie politique coordonnée du « dernier kilomètre », à l’image des politiques de transports des pays germaniques. Il nous faut également achever le déploiement de la 4G sur le réseau existant et poursuivre la résorption des zones blanches.

Numérique, mobilité, accès aux services…, quels sont les enjeux actuels pour la ruralité ?

Les exemples que vous avez cités sont justes et font partie de ma feuille de route. Au fond, l’enjeu principal pour la ruralité est la réduction des inégalités territoriales. Il s’agit de permettre à chaque citoyen de s’épanouir dans sa vie de famille, dans son travail et dans ses loisirs dans les mêmes conditions, quel que soit son lieu de résidence.

Pour cela, l’action de l’État doit s’adapter aux spécificités de chaque territoire car la ruralité n’est pas un bloc homogène, et les problématiques ne sont pas les mêmes partout. Certains territoires sont très enclavés et d’autres très bien desservis. Certains sont prospères et d’autres connaissent d’importantes difficultés économiques. La population a tendance à diminuer dans le rural « éloigné » alors qu’elle augmente en périphérie des aires urbaines les plus importantes.

La ruralité ne se limite pas non plus à la campagne : les petites villes jouent un rôle important de centralité et d’accès aux services publics dans le monde rural, en particulier les centre-bourgs.

Quel sera le rôle de l’ANCT dans l’accompagnement de ces territoires ?

L’ANCT est un établissement public encore jeune. Elle doit consolider sa structure interne et mettre en place une organisation déconcentrée. Ses trois principaux axes d’intervention doivent s’articuler autour du déploiement des programmes nationaux d’appui, de la refonte des outils de contractualisation et de la création d’une offre d’accompagnement des collectivités. 

À ce titre, l’ANCT joue un rôle de « fabrique à projets », qui est central pour la ruralité. L’offre d’ingénierie de l’agence est indispensable pour les territoires ruraux.

Je m’appuierai aussi sur l’ANCT pour mener à bon port l’Agenda rural que je compte d’ailleurs relancer en sollicitant la nomination de référents dans tous les ministères, mais aussi au sein des préfectures. À ce jour, près d’un tiers des 181 mesures de l’Agenda rural a déjà été mis en œuvre. Il nous faut atteindre une application complète d’ici la fin du quinquennat.

Crédit : Damien Carles - Terra